Les chambres de commerce et d'industrie s'alarment des intentions du gouvernement, qui selon elles, souhaite les placer sous le pilotage stratégique des conseils régionaux. Le deuxième projet de loi de décentralisation en cours de finition serait le moment choisi. Si le texte, qui doit passer entre les mains du Conseil d'Etat à la fin de la semaine, ne comporte pas de dispositions concrètes dans ce sens, les CCI se méfient des velléités du gouvernement, susceptible de réaliser ce transfert à travers des amendements durant l'examen du texte. André Marcon, président de CCI France et ses vice-présidents, ont dénoncé, lors d'une conférence de presse, mardi 25 février, une "OPA hostile". Ils se sont même associés à Pierre Gattaz, président du Medef, et Jean-François Roubaud, président de la CGPME, dans une tribune publiée le même jour dans Les Echos pour faire part de leurs craintes. Car pour le réseau, la manœuvre, si elle est confirmée, risque de fragiliser les chambres de commerce, voire, de le faire disparaître. "Petit à petit, on nous conduit à la mort", a ainsi lancé André Marcon. Il faut dire que les CCI ont déjà dû faire face à des baisses de budget importantes, représentant 20% de leurs ressources fiscales, dans la loi de finances 2014. La réforme de la taxe d'apprentissage, prévue dans le cadre du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, risque encore de les priver de ressources… Dans un communiqué, CCI France estime que le transfert envisagé "permettrait à l'Etat, dans une relative discrétion, de doter les collectivités territoriales de nouvelles ressources fiscales". "C'est un véritable détournement de fonds, a critiqué Didier Gardinal, trésorier. C'est une façon détournée de renvoyer l'argent des entreprises aux régions, tout est très organisé, avec un fil rouge qui va aboutir à la disparition des CCI si on ne réagit pas."
Les CCI mettent en avant les publics auxquels elles s'adressent, soit quelque 200.000 apprentis et 400.000 entreprises. "Qui fera le travail à notre place ?, a questionné Philippe Dutruc, président de la CCI Deux-Sèvres. Virement Sepa, accessibilité des magasins... il y a tout un ensemble de sujets que nous prenons à bras-le-corps."
Des propositions dans le cadre de la décentralisation
Pour autant, les CCI ne s'opposent pas à la décentralisation. Au contraire. "Nous travaillons avec les régions et nous souhaitons que leurs compétences soient renforcées, mais nous avons un statut différent", a assuré André Marcon, insistant sur l'indépendance des CCI. Pour montrer leur volonté de participer à la réforme en cours, les CCI ont fait part de leurs propositions. Elles souhaitent être associées aux travaux des conférences territoriales de l'action publique (CTAP), en matière de développement économique, de formation et d’aménagement du territoire. Elles entendent en particulier participer à l'élaboration des contrats de plan Etat-région 2014-2020 et à être associées à l'ensemble des projets financés en régions avec les fonds européens.
Les CCI demandent aussi aux régions de leur déléguer l'animation du guichet unique destiné à accueillir les chefs d'entreprises de TPE et PME. "Nous pouvons prendre la main pour ces guichets d'entreprises, et cela ne coûtera pas un sous supplémentaire aux régions, a signalé Pierre-Antoine Gailly, président de la CCI Paris Ile-de-France.
Plus sensible est la volonté des chambres de commerce et d'industrie de se voir confier les agences de développement, les agences pour l'international et les agences pour l'innovation. Des agences qui aujourd'hui sont éclatées entre régions, départements et métropoles. "Proposer à l'ensemble des collectivités territoriales de s'appuyer sur les chambres est la meilleure façon de rationaliser les moyens et d'éviter les structures doublons coûteuses", signalent ainsi les CCI.
Enfin, les CCI demandent que les conseils régionaux et les métropoles les associent à la mise en place de leurs schémas afin d'"organiser leur offre de service en cohérence avec ceux-ci". Elles rappellent qu'elles interviennent déjà, par voie de conventionnement, comme maître d'ouvrage ou maître d'oeuvre des collectivités.
Cette forme de partenariat, contrairement à une mise sous tutelle des régions, serait la garantie de "maintenir une cohérence nationale des politiques publiques, en particulier sur les champs de l’international et de l’innovation où l’élaboration et le suivi d’une stratégie nationale sont essentiels". Les CCI ne comptent pas en rester là. "On va continuer à parler de ce sujet", a signalé André Marcon, qui a demandé à être reçu par le président de la République et par le Premier ministre. Il devrait aussi rencontrer Alain Rousset, le président de l'Association des régions de France. "J'ai reçu plusieurs appels de présidents de région destinés à nous rassurer", a-t-il indiqué.
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