"Oui au débat, non à la violence". Le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, évoque des "scènes absolument incroyables" dans les rues de sa ville comme d'autres villes de France en marge des manifestations des gilets jaunes et des "ravages sur l'économie, le commerce – dont le petit commerce – et l'emploi". Cet aspect de la crise des gilets jaunes n'avait jusqu'ici guère été mis en avant par les associations d'élus locaux. Il fut le premier évoqué ce 23 janvier par le président de France urbaine à l'occasion des vœux de son association. Lequel s'est félicité, donc, de l'ouverture du Grand débat afin de dénouer certaines des tensions.
Le bureau de France urbaine s'est ainsi à l'unanimité prononcé pour que les maires de grandes villes et présidents de métropoles ou grandes agglomérations soient des "facilitateurs" du débat, des "contributeurs", entre autres en ouvrant des "cahiers d'expression citoyenne" dans nombre de grandes villes… mais pas nécessairement des "organisateurs", afin de "ne pas donner le sentiment que les discussions sont orientées, surtout à un an des municipales". Là-dessus donc, toutes les associations d'élus disent peu ou prou la même chose. Ce Grand Débat met en avant "des problèmes de dimension nationale (…), mais aussi des enjeux dont les réponses ne seront pertinentes que si elles se déclinent au niveau local, par exemple en matière de mobilités", rappelle Jean-Luc Moudenc.
Présent à Souillac le 18 janvier lors du deuxième échange entre Emmanuel Macron et les maires d'Occitanie, le maire de Toulouse y a vu "une formule totalement inédite, de qualité". Toutefois, fait-il remarquer, "lorsqu'on réunis tous les maires, forcément, 99% d'entre eux sont des maires ruraux et nous, les élus urbains, on se sent un peu à côté". "Il est parfaitement légitime que ces élus ruraux s'expriment" mais il ne s'agirait pas d'oublier qu'"un débat national doit restituer la totalité des problèmes"… et que "75% de la population vit dans les villes".
Coopération avec le périurbain et le rural : "On n'a pas encore assez travaillé là-dessus"
Jean-Luc Moudenc a en outre entendu "à plusieurs reprises" lors de ces échanges "des affirmations sur les métropoles et les grandes villes qui relevaient plus de la confrontation que de la coopération" et, parfois, d'une "caricature" de bienheureuses "métropoles gagnantes absolues de la mondialisation"… Attention, donc, aux "visions binaires", prévient-il. "Il est vrai que nous bénéficions de la dynamique économique", mais celle-ci s'accompagne de vraies "difficultés" : la pauvreté, l'insécurité, les quartiers politique de la ville, l'accueil des migrants, l'hébergement d'urgence, le fondamentalisme, le mal-logement, "la désertification médicale qui touche aussi les villes et pas seulement leurs quartiers prioritaires"… "Tout ça, c'est dans nos villes."
Sa mise en garde vaut tout autant pour le Grand Débat qui s'amorce. "Parce que les métropoles apportent des capacités d'innovation, permettent de compter dans la compétition mondiale"… il ne faudrait pas que les débats viennent "exacerber" les antagonismes. Ils devront au contraire, loin de tout "manichéisme territorial", permettre d'"inventer de nouvelles formes de coopération" et "relations de travail" entre intercommunalités urbaines, périurbaines et rurales. Et ce, "prioritairement sur l'économie" – ou "comment diffuser du développement économique". Jean-Luc Moudenc le reconnaît : "On n'a pas encore assez travaillé là-dessus, sur notre environnement périurbain et rural". Et reprend volontiers à son compte la fameuse notion d'"alliance des territoires" chère à la présidente de Nantes Métropole, Johanna Rolland.
France urbaine émet d'autres voeux quant à ce Grand débat. Comme toutes les associations d'élus – dont l'AMF, l'ADF et Régions de France -, elle souhaite que ce processus "débouche sur une nouvelle étape de la décentralisation". Mais aussi sur une déconcentration accrue, à l'heure où "les prérogatives des préfets sont extrêmement limitées". Dans la contribution qu'elle déposera en mars, l'association compte aussi inclure d'autres attentes : "Avoir une part de la contribution climat-énergie dans nos budgets", obtenir des réajustements face aux "nombreux défauts" du dispositif de contractualisation sur les dépenses, "avoir un paysage fiscal stabilisé" à l'approche des municipales… sans oublier un certain nombre de priorités en matière de mobilité, d'éducation ou de logement.
Intercommunalité : améliorer la gouvernance et la territorialisation des politiques
Invitée à cette cérémonie de vœux aux côtés du secrétaire d'Etat Olivier Dussopt, la ministre Jacqueline Gourault a elle aussi évoqué "des manifestations qui exacerbent l'opposition villes-campagnes", "le rôle de centralité" des métropoles et des grandes villes, "une solidarité à améliorer"… et cette nécessaire "alliance des territoires".
En termes de perspectives, la ministre en charge des collectivités a rappelé qu'Emmanuel Macron, tant dans l'Eure que dans le Lot, a une nouvelle fois mentionné la possibilité de retoucher la loi Notr – cette loi, a-t-elle dit, "qui focalise les préoccupations, au point d'être devenu le symbole de tout ce qui ne marche pas !" Mais, a-t-elle prévenu, l'idée n'est pas de "tout détricoter" : "Les grands bouleversements n'auront pas lieu."
Jacqueline Gourault estime en outre qu'"on n'échappera pas à l'amélioration de la gouvernance au sein des intercommunalités", que "la territorialisation des politiques publiques au sein des grandes intercommunalités est un vrai sujet" et qu'en termes de solidarité financière au sein des intercommunalités, "des choses existent mais ne sont pas toujours utilisées.
Comme elle l'avait déjà fait la veille lors des vœux de l'Assemblée des communautés de France (ADCF), la ministre a souhaité mettre l'accent sur l'intérêt de développer les contractualisations "sur des objectifs précis", comme c'est le cas avec le programme Action cœur de ville, ou "sur un territoire à besoins particuliers" – le contrat "Engagement pour le renouveau du bassin minier", les contrats en préparation avec les départements "en difficulté" de la Creuse et de la Nièvre, le "pacte breton"…
Quant au "plus de décentralisation"… "Il faut avoir un débat sur ce que l'on entend par là, car tout le monde n'est pas sur la même longueur d'ondes", juge-t-elle.
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