Après le think-tank TDIE, c'est au tour de la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut), de la Fédération des usagers de la bicyclette (FUB) et de l'UFC-Que choisir de profiter des élections régionales pour faire avancer leurs revendications en matière de transport, singulièrement à l'égard des trains express régionaux (TER). Que les candidats se rassurent : pas de dossier à remplir en amont du vote cette fois. En revanche, les (futurs) élus se voient fixer un objectif de hausse de la fréquentation des TER de 50% d'ici 2030. Un taux qui pourrait paraître ambitieux, puisque après une "décennie dorée" qui a vu cette fréquentation croître de 55% entre 2002 et 2012, les associations constatent que la "dynamique est cassée". La fréquentation stagne depuis dix ans, au point "qu'un plafond semble atteint", et l'on redoute l'impact du covid. Pour autant, Alain Bazot, président de l'UFC-Que Choisir, le juge "réaliste" (relevant que le taux d'occupation moyen d'un TER est de 27% seulement, sans distinguer toutefois les périodes, creuses ou de pointe) et "atteignable", alors que "le recours aux TER ne concerne que 1,5% des déplacements contre 3,6% en Allemagne". Mais aussi "souhaitable", faisant miroiter les 0,94 million de tonnes CO2 qui seraient économisées chaque année si l'objectif était atteint.
Un "point noir persistant" : la qualité du service
Pour y parvenir, les trois associations insistent sur la nécessaire amélioration d'un "point noir persistant" : la qualité du service. Un élément capital (voir la récente étude de l'Institut Paris Région), comme l'a d'ailleurs souligné Christophe Béchu, ex- et sans doute futur président de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, lors de son audition le 26 mai par le Sénat (voir notre article) : "l'attractivité d'un mode de transport ne dépend pas [seulement] de la qualité de l'infrastructure, mais de celle du véhicule. L'état des rails importe moins aux Français que l'état des trains", déclarait-il. Sauf, s'entend, si le premier emporte des conséquences sur la fiabilité du service... Les trois associations relèvent que cette dernière est "à la traîne". En 2019, dernière année pré-covid, un TER sur dix n'a même pas réussi à prendre le départ (9,7%). Et parmi ceux qui sont parvenus à franchir cette étape, 10% sont arrivés à quai avec retard (plus de 5 minutes). "Pour un abonné, cela signifie un impact deux fois par semaine", souligne Alain Bazot. Des résultats disparates d'une région à l'autre, la situation étant meilleure en Bretagne (87,2% des trains à l'heure) et dans la région Grand Est (86,3%) qu'en Occitanie (74,3%) ou dans la région Sud (76%).
Pour Alain Bazot, ils placent la France "dans le wagon de queue de la ponctualité". Il envie la situation de l'Autriche (4,3% de trains en retard de plus de 5 minutes), des Pays-Bas (4,8% en retard de plus de 3 minutes) ou de l'Allemagne (5,7% de trains en retard de plus de 6 minutes), qui montrent qu'il n'y a pas de fatalité.
"Les chiffres évoqués (...) ne reflètent pas la performance réelle des TER", a réagi la SNCF, notant notamment que "la régularité des TER est passée de 90% en 2016 à plus de 92,3% en 2019" et "n'a pas cessé de progresser depuis plusieurs années" pour atteindre 94% à ce jour. Les TER ont regagné plus de voyageurs entre 2016 et 2019 qu'ils n'en avaient perdu entre 2012 et 2016, avec un taux de satisfaction global des clients passé de 81,6% à 85,9% de 2016 à 2019, a ajouté la compagnie.
Mais pour "casser le plafond de verre", et atteindre l'objectif fixé, les trois associations font ressortir cinq conditions et formulent "dix propositions concrètes".
Cinq conditions du succès
• Améliorer enfin la fiabilité des TER, en fixant un objectif de hausse de 2 points du taux de ponctualité des TER dans les deux ans. Les régions sont ainsi invitées à renforcer les bonus/malus dans les contrats de délégation du service public, en portant à 3% la part des subventions d'exploitation attribuées au regard des performances en la matière (elles oscilleraient aujourd'hui entre 0,7% et 1%, selon les régions). "Rien d'étonnant à ces piètres performances, dans la mesure où la SNCF n'est soumise qu'à peu de contraintes de la part des conseils régionaux", estiment les associations, qui considèrent "indispensable que les retards et les annulations coûtent à l'entreprise pour la pousser à améliorer son service". Les régions, à l'image de la Normandie, ne ménagent pourtant par l'opérateur.
• Faciliter l'intermodalité avec le vélo, en subventionnant études et travaux visant à sécuriser l'accès de ce mode de déplacement vers les gares et hubs multimodaux, en améliorant les infrastructures de stationnement des vélos en gare et en facilitant, au-delà des minima définis par la loi d'orientation des mobilités (LOM), leur embarquement tant dans les trains que dans les cars, particulièrement sur les lignes où la demande est forte, et ponctuellement sur les itinéraires touristiques à vélo.
• Rendre "plus justes" les abonnements, en indemnisant les retards répétés, via un remboursement partiel de l'abonnement, ou en permettant la suspension de ce dernier en cas d'interruptions du trafic de longue durée (grèves, pandémies…).
• Améliorer "l'articulation pratique entre TGV et TER", notamment en favorisant le report d'un mode sur l'autre. Les régions sont ainsi conviées à négocier une convention avec SNCF Voyageurs afin de permettre l'utilisation des TGV en bout de ligne "aux conditions du TER" ou encore à assurer la mise en cohérence des différentes cartes de réduction (qui, liberté tarifaire régionale aidant, offrent des niveaux de réduction différents selon les régions).
• Mieux associer les représentants des usagers aux décisions structurantes, en distinguant dans l'organisation des comités des partenaires mis en place par la LOM deux missions : stratégique d'une part, pour laquelle une réunion annuelle est suffisante ; de suivi de "l'exécution des services" d'autre part, qui exige des réunions plus fréquentes et régulières. Des comités dont on relèvera que la composition et les missions donnent lieu à débats lors de la discussion en cours du projet de loi Climat et Résilience.
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